OUVRONS LA FENÊTRE

Jour 27

Nous nous accoutumons à l’obscurité
Quand on éloigne la lumière ;
Si la voisine tient la lampe
Pour nous dire au revoir,

Pendant un moment nos pas sont incertains
À cause de la nouveauté de la nuit,
Puis nous adaptons notre vue à l’obscurité
Et marchons droit au-devant de la route !

Il en est de même des ténèbres plus sombres,
Ces nuits du cerveau
Où pas une lune ne montre un signe,
Où pas une étoile ne luit en notre for intérieur.

Les plus braves tâtonnent un peu
Et parfois cognent contre un arbre
Directement sur le front ;

Puis ils apprennent à voir.

C’est que l’obscurité change
Ou bien quelque chose dans la vue
S’adapte à minuit,
Et la vie avance presque tout droit.

 

Emily Dickinson

In, Poèmes choisis

Éditions Montaigne